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    Retards de paiement : une vulnérabilité française ?
    5 août 2025

    Retards de paiement : une vulnérabilité française ?


    En 2024, la France n’a pas réussi à transformer l’essai engagé après la crise sanitaire : le retard moyen de règlement des factures s’est hissé à 13,6 jours, soit un jour de plus qu’en 2023 et, surtout, au-dessus de la moyenne européenne (13,4 jours).

    Derrière cette moyenne se cache un prélèvement massif de trésorerie : près de 15 milliards d’euros immobilisés dans les comptes clients des PME françaises en 2023 et en 2024.

     


    Un glissement alarmant dans le secteur privé


    La dérive touche d’abord les grandes entreprises : elles règlent leurs fournisseurs avec 18 jours de retard quand les micro-entreprises restent, pour quatre sur cinq, ponctuelles.

    Ce différentiel crée une chaîne de transmission du risque de liquidité qui pénalise les acteurs les plus fragiles.

    En outre, la part des retards « majeurs » — ceux qui dépassent trente jours — atteint 9,1% des transactions, en hausse de 0,8 point.

     


    Des services publics à deux vitesses


    Pour l’État et les collectivités, la digitalisation de la dépense via Chorus Pro porte enfin ses fruits : les ministères règlent en 14,2 jours et les collectivités locales à 19,7 jours.

    En revanche, le secteur hospitalier reste l’angle mort : 63,4 jours en métropole et jusqu’à 121,5 jours outre-mer malgré un délai comptable maîtrisé à 13,9 jours.

    La tension budgétaire chronique des établissements annule ici le bénéfice des réformes procédurales.

     


    La sanction comme révélateur


    La DGCCRF, bras armé de la loi, a contrôlé 737 établissements en 2024 ; 42,3 % étaient en anomalie, contre 34 % l’année précédente. Les amendes et « pré-amendes » totalisent 69 millions d’euros, soit +18,5 % en un an.

    Trois secteurs concentrent plus du tiers des pénalités : le commerce de gros, l’automobile et les services financiers. Ces chiffres traduisent moins une sévérité accrue qu’un effet de rattrapage : la plupart des contrôles visent désormais les groupes récalcitrants identifiés lors des campagnes précédentes.

     

    L'avis de notre chef de projet poste clients

    “Les contrôles renforcés changent la négociation. On écrit noir sur blanc : petite remise si paiement rapide, acompte au démarrage, paiements par étapes, ou schéma où un partenaire paie d’abord (reverse factoring)."

     


    Où les retards s’enracinent-ils ?


    Les services intensifs en main-d’œuvre (information-communication, services aux entreprises, transports) affichent les délais les plus longs, oscillant plutôt entre 16 et 17 jours en 2024, tirés par la hausse des coûts de l’énergie et par la pression concurrentielle sur les marges.

    Le bâtiment, longtemps considéré comme à risque, se stabilise autour de 11,5 jours, preuve que la chaîne logistique post-Covid se rétablit. Enfin, la dimension territoriale reste marquée : l’Île-de-France, fortement tertiarisée, culmine à 18,1 jours quand la Bretagne demeure sous la barre des onze jours.

     


    Comment inverser la tendance ?


    Pour les entreprises, la première étape consiste à cartographier systématiquement les clients à risque, notamment ceux dont le retard dépasse trente jours, et à plafonner leurs encours.

    La dématérialisation intégrale de la facturation permet ensuite de raccourcir le cycle « order-to-cash » de un à trois jours ; nombre de précurseurs y ajoutent un rapprochement automatique entre bon de commande, bon de livraison et facture pour fiabiliser la validation.

    Sur le plan contractuel, remplacer les remises de fin d’année par un escompte de règlement anticipé (par exemple : 1 % dans les dix jours, net 60) redonne une valeur-temps à la trésorerie.

    Enfin, l’affacturage sélectif et les programmes de reverse factoring offrent un coussin de liquidité, à condition d’en mesurer le coût réel (taux interne de financement + commissions).

     

    La recommandation opérationnelle de notre chef de projet poste clients

    Établir un plan d’action sur 90 jours : classer les clients par risque et limiter les montants pour les plus lents. Utiliser des outils de recouvrement de créances comme Eloficash, avec des relances automatisées permet de réduire votre DSO."

     


    Et du côté des pouvoirs publics ?


    La priorité doit aller au plan de rattrapage hospitalier : l’objectif d’un paiement à cinquante jours, inscrit dans la loi, n’est toujours pas atteint et creuse un écart concurrentiel avec les fournisseurs étrangers mieux payés chez eux.

    En parallèle, la publication de tableaux de bord territoriaux sur les délais de paiement des collectivités instaurerait une saine émulation, tout en donnant de la visibilité aux fournisseurs.

    La DGCCRF pourrait, quant à elle, renforcer la « publicité des sanctions » : le naming-and-shaming a déjà fait ses preuves dans le commerce de détail mais reste peu dissuasif pour certains groupes internationaux.

     


    Conclusion


    L’année 2024 rappelle que le retard de paiement est un levier de compétitivité-prix et un baromètre de confiance

    Tant que la France ne se hissera pas durablement sous la barre des dix jours de retard — seuil déjà atteint par plusieurs voisins — elle restera défavorisée dans la compétition européenne.

    Les entreprises capables de sécuriser leur cash-flow aujourd’hui prendront, demain, une longueur d’avance quand la conjoncture économique se redressera.

     


    SOURCES


    Banque de France – Rapport de l’Observatoire des délais de paiement 2024

    Option Finance – France : les retards de paiement en forte hausse au deuxième trimestre 2025, Bercy accroît les sanctions


    Thomas, de Finopsys

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